En 2009, Pierre Bouchard se demande quoi faire. Observant longuement une feuille de papier, il se dit qu’il y aurait moyen de la transformer en fanzine s’il prenait le temps de la plier en deux. L’idée est intéressante. Intrigante. Il ne lui reste plus qu’à déterminer ce dont traitera cet hypothétique fanzine. Puis il se rappelle que le but ultime de toute activité culturelle est le partage de la connaissance. C’est à ce moment clé de son existence que Pierre Bouchard s’embarque, sans trop en être conscient, dans l’aventure de Je sais tout. Mu par l’envie de partager tel l’encyclopédie sur pattes qu’il est la totalité de son savoir sur Jocelyne Blouin, il couche sur cette unique feuille de papier qu’il observait précédemment ce qui deviendra le premier d’une série de fascicules éducatifs auto-édités : Je sais tout sur Jocelyne Blouin.
Les gens de son entourage sont emballés par cette initiative et un second ouvrage voit le jour : Je sais tout sur les chèques géants. Encore une fois, Pierre ne s’informe aucunement sur le sujet du livre avant d’entamer la rédaction de celui-ci – inventant des faits véridiques au fur et à mesure qu’ils lui passent par la tête. Cette méthode de travail deviendra, au fil des ans, une démarche artistique. Il en va des choses de la création comme des choses de la vie : si on fait la même affaire assez souvent, ça devient une habitude. Pis c’est bin difficile de se défaire d’une habitude. Lorsque Luc Bossé des Éditions Pow Pow lui propose de publier un recueil de capsules Je sais tout sous la forme d’un livre intitulé Je sais tout, Pierre ne sait qu’une chose : il ne consultera pas une maudite page wikipedia lors la création de ce magnum opus du savoir anecdotique universel.
Prenant le pouls du contemporain, l’auteur capte l’esprit de son temps : l’eau de Pâques, le saumon, le ballon-balai, les servants de messe, Charlize Theron… Les sujets qui intéressent Pierre sont ceux dont la pertinence dépasse l’engouement passager. S’inspirant du philosophe italien Giorgio Agamben, qui écrit que « la contemporanéité est […] une singulière relation avec son propre temps, auquel on adhère tout en prenant ses distances; elle est très précisément la relation au temps qui adhère à lui par le déphasage et l’anachronisme », Pierre Bouchard décide d’explorer les limites mêmes du rapport au présent en convoquant une figure de notre passé : le journaliste et politicien René Lévesque, avec lequel il collabore le temps d’une capsule Je sais tout sur le président américain John F. Kennedy. « Ça a vraiment été un honneur de travailler avec quelqu’un qui est mort », explique l’auteur. « J’ai vraiment hâte que les gens lisent ça. » Je sais tout sort en septembre 2014 aux Éditions Pow Pow.
